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Mon lieu de résidence est le quartier de Verdun à Montréal. J’y suis déménagée avec mon copain et mes deux chats en 2019, après avoir vécu six ans à Toronto. Mon appartement se situe à environ 5 minutes d’un sentier naturel qui borde le lac Saint-Louis. L’intimité que je partage avec ce point d’eau, n’est pas singulière, mais elle est mienne. Cette étendue qui m’apporte sérénité et refuge est aussi un agent de connexions humaines, portant la mémoire de temps profonds. Durant la pandémie, ma proximité au lac a eu un effet plus que régénérateur: C’est un lieu qui pouvait me contenir entière, lorsque mon corps et mon esprit semblaient trop étroits.

Une pluie torrentielle en août 2020 a forcé une délocalisation soudaine. L’accumulation d’eau de pluie sur le toit s’est infiltrée dans le triplex, endommageant les plafonds, parcourant les cavités du bâtiment tout en ramassant les dépôts de saleté et les résidus de vieux matériaux de construction. Les murs suintaient une eau brunâtre que l’on recueillait tant bien que mal dans des pots, des chaudrons, des bacs de rangements. On épongeait le liquide nauséabond avec des guenilles et des serviettes. À mon désarroi, l’ampleur des dégâts m’a rappelé que l’eau est aussi un agent de destruction.

Durant ma première visite de recherche commissariale à Sherbrooke, mon attention s’est portée sur les fresques semées à travers la ville. J’étais intriguée par ce projet de revitalisation urbaine, ses codes et messages, les bribes d’histoires choisies comme étant les faits marquants de l’établissement de la municipalité et ses communautés. Je me demandais, quelles narrations sont mises en lumière et quels récits sont effacés? J’ai remarqué un motif récurrent dans la représentation que Sherbrooke se fait d’elle-même : l’eau. L’exposition de groupe Les yeux dans l’eau s’inspire de l’influence des cours d’eau sur l’identité des communautés riveraines. Cette exposition prend pour point de départ la géolocalisation de la Galerie d’art Foreman de l’Université Bishop’s à Lennoxville, et le Centre en art actuel Sporobole, situé au centre-ville de Sherbrooke. Établis sur le territoire traditionnel et non cédé du peuple Abénakis et au croisement des Rivières St-François, Magog et Massawippi, les arrondissements du centre-ville de Sherbrooke et de Lennoxville sont bordés de toutes parts par des cours d’eaux porteurs d’histoires et de rencontres inter-espèces. La mémoire de ces rivières est imprégnée de récits socio-naturels enchevêtrés avec la colonisation des terres et des eaux.