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Camila Vásquez –

Observaciones y reflexiones de la curadora

Septiembre 2024

Hacía un calor de locos en el taller de Florencia Sosa Rey esa tarde de mediados de septiembre en Montreal. A pesar de la tentación de ir a echarnos a un parque, ahí estábamos, concentradas y lúcidas, reflexionando juntas, haciéndonos preguntas y dejándolas sin respuestas. Entre lápices de colores, revistas, libros, papeles y dibujos pegados a las paredes, fotos y fechas límite de postulación (que nos recuerdan que los plazos se cumplen inevitablemente), retomamos una conversación que habíamos iniciado varios meses antes, cuando, conmovidas e interconectadas por un enigmático hilo invisible, hablamos por primera vez de su obra FatherDaughter (2022). Se trata de una performance en la que Florencia trabajó con su padre, iniciándolo en ese universo que a él le resultaba lejano y, al comienzo, incomprensible, transmitiéndole sus conocimientos y su experiencia. El gesto es simple y repetitivo: ambos caminan en círculos concéntricos, cruzando miradas y, al mismo tiempo, siguiendo sus respectivas trayectorias, en una cancha de fútbol, vestidos con ropa deportiva. La carga simbólica se vuelve más compleja, espesa, cuando se comprende que él era profesor de educación física en Argentina. Profesión que nunca pudo ejercer tras inmigrar a Quebec. No es de extrañar, entonces, que se me llenaran los ojos de lágrimas al ver el vídeo de esa performance, siendo yo misma parte de la diáspora latinoamericana.

Observations et réflexions de la commissaire

Septembre 2024

Il faisait une chaleur de plomb dans l’atelier de Florencia Sosa Rey en cet après-midi de la mi-septembre à Montréal. Malgré la tentation d’aller lézarder dans un parc, nous étions là, concentrées et lucides, à réfléchir ensemble, à nous poser des questions et à les laisser sans réponse. Entre les crayons de couleur, les magazines, les livres, les papiers et les dessins collés aux murs, les photos et les deadlines de dossiers (qui nous rappellent que les échéances arrivent inévitablement), nous avons repris une conversation entamée quelques mois plus tôt, lorsque, émues et reliées par un énigmatique fil invisible, nous avons parlé pour la première fois de son œuvre FatherDaughter (2022). Il s’agit d’une performance dans laquelle Florencia a travaillé avec son père, l’initiant à cet univers lointain et, au début, incompréhensible pour lui, lui transmettant ses connaissances et son expérience. Le geste est simple et répétitif : tous deux marchent en cercles concentriques, croisant leurs regards et suivant à la fois leurs trajectoires respectives, sur un terrain de football, en tenue de sport. La charge symbolique se complexifie, s’épaissit, lorsqu’on réalise qu’il était professeur d’éducation physique en Argentine. Profession qu’il n’a jamais pu exercer après avoir immigré au Québec. Il n’est donc pas étonnant que mes yeux se soient remplis de larmes lorsque j’ai vu la vidéo de cette performance, faisant moi-même partie de la diaspora latino-américaine.

Florencia Sosa Rey, On Horizon and (un)Belonging, studio de l'artiste (2024) // artist's studio (2022). Image : courtoisie de l'artiste // courtesy of the artist.
Florencia Sosa Rey, résidence ArtLab 2024-25, « To ease abandon », dessin: crayon de bois sur papier (2024) // ArtLab residency 2024-25, "To ease abandon", drawing: wood pencil on paper (2024)
Florencia Sosa Rey, résidence ArtLab 2024-25 // ArtLab residency 2024-25

La cuestión que nos reunía esa tarde calurosa también tenía que ver con la transmisión de conocimientos y con cómo explorar la porosidad entre lo que consideramos una obra de arte formal y la práctica de facilitar talleres artísticos. Porque Florencia se mueve entre esos dos mundos y a mí me intriga cómo compartir con el público la experiencia de dar o participar en un taller, y si es posible hacerlo conservando la autenticidad del proceso creativo, tan lejos del resultado final. He sido testigo de la vulnerabilidad y el coraje con el que artistas y participantes se entregan plenamente a la experiencia de crear en el transcurso de un taller. Ese registro me interpela, por el potencial de expresión lo que lo distingue de un espectáculo o de una presentación.

Conversamos sobre algunas propuestas que exploran de manera experimental esta zona ambigua entre lo que se define como obra o como práctica: El ensayo abierto en danza contemporánea, seguido de un debate con el público; Un festival en el que no se trataba de performances en sí, sino de un periodo de práctica de ejercicios performativos con público (Festival AVEC, Sherbrooke, 2024); Un evento en el que se alternaban performances y talleres y en el que los miembros del público eran a la vez público y participantes (Studio 303, Montreal, 2024); el vídeo In Spite of the Score de Julia E Dyck (2023), que era un taller de sonido al que Florencia asistió y en el que la gente que participaba era también intérprete en el vídeo.

La question qui nous réunissait en ce chaud après-midi portait aussi sur la transmission des savoirs et sur la manière d’explorer la porosité entre ce que nous considérons comme une œuvre d’art formelle et la pratique de l’animation d’ateliers artistiques. Car Florencia évolue entre ces deux mondes et, pour ma part, je suis intriguée par comment partager avec le public l’expérience d’animer ou de participer à un atelier, et s’il est possible de le faire en préservant l’authenticité du processus créatif, si loin du résultat final. J’ai été témoin de la vulnérabilité et du courage avec lesquels artistes et participant·es se livrent pleinement à l’expérience de création au cours d’un atelier. Ce registre m’interpelle, par son potentiel d’expression qui le distingue de celui du spectacle ou d’une présentation.

Nous avons parlé de quelques propositions qui explorent de manière expérimentale cette zone ambiguë entre ce qui est défini comme une œuvre ou une pratique : La répétition ouverte en danse contemporaine, suivie d’une discussion avec le public ; un festival dans lequel il ne s’agissait pas de performances en soi, mais d’une période de pratique d’exercices performatifs avec public (Festival AVEC, Sherbrooke, 2024) ; un événement où les performances étaient alternées avec des ateliers et où les membres du public étaient à la fois regardant·es et participant·es (Studio 303, Montréal, 2024) ; la vidéo In Spite of the Score (2023) de Julia E Dyck, qui était un atelier de son auquel Florencia a assisté et dans lequel les personnes qui ont participé étaient également des interprètes dans la vidéo.

Florencia Sosa Rey, Te devuelvo la mirada, image fixe d'une vidéo en cours(2022) // still image video work in progress (2022). mage : courtoisie de l'artiste // courtesy of the artist.
Florencia Sosa Rey, Te devuelvo la mirada, image fixe d'une vidéo en cours(2022) // still image video work in progress (2022). mage : courtoisie de l'artiste // courtesy of the artist.

Más allá de cuál fuera la forma que tomara la residencia ArtLab 2024-25, importaba revelar cuáles eran las motivaciones de Florencia, qué temas la habitaban y qué avenidas quería abrir. Un enfoque resultó central: Explorar sus raíces culturales sudamericanas desde la distancia y en diferido, manteniendo el carácter experimental del proyecto y alejándose del documental. Por ejemplo: ¿cómo reapropiarse del folclore a través de la abstracción? ¿Bailar sin bailar? ¿Crear ritmos sin instrumentos? O, sino (o más bien, y también), explorar por el contacto silencioso y profundo con los caballos y la equiterapia el pasado campesino de su abuelo fallecido, como un medio de acercarse a la herencia sociocultural de su país de origen, en ausencia de la transmisión oral de una tradición familiar desaparecida. Proceso que Florencia había comenzado durante una residencia de artista en la región de Catamarca, en Argentina, en el marco del proyecto Te devuelvo la mirada.

« ¡Tenemos algo! », me dice Florencia con una sonrisa en la cara. Y a mí, « algo » me dice que vamos por buen camino.

Au-delà de la forme que prendrait la résidence ArtLab 2024-25, il était important de révéler quelles étaient les motivations de Florencia, quels thèmes l’habitaient et quelles avenues elle souhaitait ouvrir. Une piste est apparue comme centrale : explorer à distance et en différé ses racines culturelles sud-américaines, en conservant le caractère expérimental du projet et en prenant de la distance avec le documentaire. Par exemple : comment se réapproprier le folklore par l’abstraction, danser sans danser, créer des rythmes sans instruments ? Ou, sinon (ou plutôt, et aussi), explorer par un contact silencieux et profond avec les chevaux et l’équithérapie le passé paysan de son grand-père décédé, comme moyen d’approcher le patrimoine socioculturel de son pays d’origine, en l’absence de la transmission orale d’une tradition familiale disparue. Un processus que Florencia avait entamé lors d’une résidence d’artiste dans la région de Catamarca, en Argentine, dans le cadre du projet Te devuelvo la mirada [Je te renvoie le regard].

« Nous avons quelque chose ! », s’exclame-t-elle en souriant. Et ce « quelque chose » me dit que nous sommes sur la bonne voie.